vendredi 21 janvier 2011

Envie de pages blanches



Il y avait ce petit carnet dans lequel je transcrivais amoureusement tous les textes que j'ai écrits pour lui. J'avais même trouvé un titre qui faisait joli: De l'Ange au Loup. Un petit cadeau que je préparais pour son anniversaire. Et même si la nature de notre relation a dû changer avant que j'aie pu le lui offrir, je n'ai pas voulu renier ces mots... Ce carnet, il racontait notre histoire. Et elle avait été belle, cette histoire. Je le lui offrirais quand même...

Attablés dans un petit restaurant, nous discutions de tout et de rien. Je tentais de ne pas penser à ces quelques feuilles de papier, mais il me semblait que sur la nappe rouge, mon petit carnet faisait comme une tache beige. Un oiseau échoué dans une mer de sang. Effet dramatique. Lâcher prise... Je devais lâcher prise.

A-t-il remarqué combien ce fut difficile, pour moi, de m'en séparer? Symboliquement, en lui offrant ces mots, j'acceptais l'idée que ce "nous" que nous avions été ne serait jamais plus le même... Et ça me tuait, un peu...

Je l'observais, pendant qu'il lisait le petit mot que je lui avais écrit, pour accompagner mon présent. Il a fait une blague, cherchant peut-être à cacher son émotion, mais je l'ai vu. Il était touché. Ému. Il a ouvert le carnet et en a feuilleté les pages, souriant au souvenir de ces images que j'avais créées en pensant à nous...

Je regardais ses mains, incapable de supporter la vue de son visage à la fois ému et rêveur... Je regardais ses mains, tentant tant bien que mal de refouler le souvenir de leur douceur et de leur chaleur. Essayant de faire taire cette envie de les sentir sur ma peau...

Ses doigts faisaient défiler les pages, s'attardant sur le début d'un texte, frôlant les mots que ma plume avait tracés... Je le regardais feuilleter les pages de notre histoire et une vague de chagrin m'a submergée... Il tournait les pages, et j'ai soudainement pris conscience que notre histoire avait une fin... Les pages défilaient, il n'y en aurait bientôt plus qu'une, puis plus du tout... La fin de notre histoire... Ce nous, il avait une fin... Mon carnet n'avait plus de pages blanches sur lesquelles écrire une suite...

Il a été délicat, il n'a pas bronché lorsqu'il m'a vue essuyer une larme.
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